Dos nu courbé cheveux relevés sur son ouvrage concentrée
nuque perlée de sueur
Elle tisse
Elle mélange les couleurs aux souffles de son cœur
Les fils se débobinent et dansent un arc-en-ciel en transe
Elle tisse le chant des oiseaux, la chaleur de la lave, la
saveur d’une tisane, la fièvre d’un sourire, le nectar d’un regard affamé, un
air de jazz dans des barbules en hélice, le bruissement d’une colombe sous l’or
de Séléné
Elle tisse
En bleu les racines sauvages
En mauve un joli coquillage
En jaune un bateau en voyage
En rouge un chêne qui n’a pas d’âge
En vert les flots et ses rivages
En blanc un ange de passage
En gris la brume
Elle tisse
A contre-jour quelques mèches glissent sur son visage et leurs
ombres impriment sur le mur anthracite des chevaliers abimés, des fées sur la
pointe des pieds
A contretemps une horloge crépite des secondes infinies qui tremblent
le voilage à l’oblique d’une fenêtre entre ouverte vers le monde
A contre sens les arabesques s’enroulent aux spirales fragiles
faisant croire un mouvement, un élan impossible , une main qui se tend
Elle passe son sourire et ses doigts fragiles sur le relief
d’un éléphant fleuve, d’une vague salée, d’une étoile frileuse, d’un bougie
allumeuse, d’un chemin funambule, d’un chat ébouriffé
Elle tisse une étoffe parfumée de torrents vaporeux et d’océan
mousseux
Elle tisse, seule dans son atelier, un tissu de fortune, une
étole colorée de comètes lointaines pour s’enrouler de paix
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire